31 août 2009

87. Cher papa...

Cher papa,

Il y a maintenant tout près de 20 longues années que tu es brusquement parti pour un autre monde. Vingt ans, c'est à peine l'âge que j'avais en ce temps-là. Je t'avoue que ce premier face-à-face avec la mort m'a frappé et frappé très fort.

Ceux qui t'ont connu t'ont aimé, admiré, adoré, adulé et certains même, détesté avec une force démesurée. Pour ma part, saches que j'éprouve pour toi un curieux mélange de tout cela. Depuis, le temps a traversé mon corps et mon âme: mes cheveux grisonnent et mon âme mûrit. Lorsque je me regarde dans un miroir, c'est un peu... non, c'est beaucoup de toi que je vois et cela me fait sourire immanquablement.

Même si les blogs étaient inexistant en ton temps, tu dois maintenant savoir que j'ai entreprit il y a plusieurs mois un long voyage en Amérique latine. Je sais, je sais... tu n'approuverais pas vraiment, mais heureusement, l'âge adulte me permet maintenant de prendre mes propres décisions sans consentement parental. Je ne peux m'empêcher de penser que ce goût de la découverte et de l'aventure, c'est toi qui me l'a légué. Un peu comme toi en Afrique, j'ai traversé le Mexique, le Bélize, le Guatemala, le Honduras, le Nicaragua, le Costa Rica, le Panama, le Pérou, la Bolivie, l'Argentine et maintenant le Chili. Et ça continue.

Durant ce long voyage, j'ai ris aux larmes, pleurer de tout mon âme, nagé à contre courant, levé le poing contre l'injustice, tendu la main à la pauvreté, serré dans mes bras les enfants du désespoir, été témoin d'atroces violences inhumaines, admiré d'innombrables merveilles naturelles, maîtriser une cinquième langue, pris une multitude de risques, fleurté avec la mort à plus d'une reprise, fait l'amour passionnément et dansé éperdument. Quelle aventure, tu ne trouves pas?

Que tu reposes maintenant divinement en paix ou que tu mènes la vie dure au diable, j'imagine que tu le fait avec la même intensité avec laquelle tu as vécu ta vie parmi nous. Cette même intensité m'inspire et me manque à la fois.

Sache que dans mon coeur, tu auras toujours une place de choix.


Harry


24 août 2009

86. Adios Clarita

Apareciste en mi vida como una estrella volando.
Sin ninguna pregunta, ojos cerrados, me seguiste,
Tu mochila llena de tus sonrisas, tu curiosidad y tu locura.

Vimos lugares encantados y encontramos a gente tan amable.
Juntos tuvimos miedo del fred y del viento soplando.
¿Qué importaba? Caminando fuimos, volando viajamos.

Y ya Clarita, chica catalana, ahora te vas.
Te vas porqué no hay momentos infinitos.
Te vas porqué tu vida te llama, te espera.

Siguela y acuerdate de esta corta historia loca,
Como te recordaré a ti... con sonrisa y cariño.

Harry
xox


18 août 2009

85. Bande de fous!

Il fait froid. Il fait extrêmement froid: moins 25 degrés plus précisément. Clara, Gloria, Blanca, Eduardo, Ricardo et moi sommes à 5000 mètres d'altitude, dans un petit village qui ne porte pas de nom tellement il est petit. Ce groupuscule s'est intimement formé à l'intérieur d'un 4x4. Depuis deux jours, notre guide local (Hilarion) nous a fait traversé un désert de sel, un désert de sable, des volcans, des lacs colorés, des envolés de flamands roses, des routes impossibles, des nuages de poussière et des rivières glacées. Bref, une vraie virée de condensé touristique.

Tout comme Clara, Blanca et Gloria viennent du Nord de l'Espagne. Ricardo est un croisement péruvien et vénézuélien. Quand à Eduardo, il est brésilien, un étalon pure race. Ensembles, les trois filles s'amusent à se parler en Catalan, que nous arrivons à décoder en majeure partie. De temps à autres, Eduardo a le cerveau congelé et nous sort inconsciemment quelques mots de portugais. Bref, c'est le party linguistique entre nous. On s'amuse, on déconne, on blague, on taquine et on rit à en perdre le souffle (c'est pas très difficile à 5000 mètres, car l'air se fait rare ici...).

Avant le souper, Hilarion nous conseille d'aller prendre une marche afin d'apprécier le paysage environnant. Le soleil commence sa descente et le vent se lève... se lève et nous soulève presque. Vêtus de tous les vêtements que nous possédons, nous marchons serrés les uns contre les autres. Eduardo a même emmené son sleeping bag afin de nous protéger tous du méchant vent glacial. Clara tremble comme une feuille. Gloria en sent plus ses dix doigts. Blanca a le nez bleu. Ricardo ne chante plus (c'est rare!) et Eduardo dit des mots sales en portugais. Y fait frette!

Une fois à l'intérieur de notre dortoir, nous poussons tous les lits ensemble et nous nous emmitouflons tous sous les couvertures de laine. Y fait fret, fret, fret! Une fois notre chaleur corporelle partagée et toutes nos blagues épuisées, nous nous regardons tous, un peu ennuyés. J'ai alors la brillante idée de sortir mon portable et de leur passer un film: La misma luna (Under the same noon).

C'est l'histoire de Carlito, un garçonnet mexicain de 9 ans qui attend patiemment sa mère qui a immigré illégalement aux États-Unis il y a 4 ans. Suite à la mort de sa grand-mère, il décide d'en faire de même afin de la rejoindre. Après un long périple, il s'apprête à traverser la frontière, bien caché au fond du coffre d'une camionnette d'un couple sans soupçons. Et alors que les méchants douaniers américains s'apprêtaient à fouiller le coffre... la batterie de mon ordi rend l'âme, sous la torture du froid. Nooooooooooooooooooooooooooooooooooon!!!! Mes comparses avaient la bouche ouverte et remplie de suspens. Maintenant, ils s'apprêtent à tuer mon portable. Et je crois que je serai le prochain.

Je tente désespérément de trouver une prise afin de le recharger, mais il n'en existe aucune. Il se trouve que le complexe est alimenté à l'énergie solaire et n'alimente que les ampoules qui nous éclairent. Au loin, j'entends de la musique. Je cours vers la salle des guides qui refusent systématiquement de me laisser brancher mon portable dans l'unique prise au lieu de leur lecteur CD. Shnoutte!

Je retourne au dortoir afin de leur annoncer la triste nouvelle. Je crains alors pour ma vie. À court d'option, ils m'implorent de leur raconter le reste du film, à capella. Non, mais ça va pas la tête?! Bon. Je m'installe devant ma bande d'emmitoufflés jusqu'aux dents et raconte en espanish le reste de l'histoire.

Je débute timidement, puis me réchauffe tranquillement. Peu à peu, j'y mets des mots dithyrambiques, des gestes amples, des mouvements en hauteur et des chutes dramatiques. En moins de deux, j'ai devant un moi un mini-public à bouches ouverte et affamé de la suite. Ils explosent de rire, ce qui m'incite à en offrir davantage. Je m'évertue à trouver les mots espagnols justes, mais dans la cohue théâtrale, je trébuche sur le vocabulaire, ce qui les fait encore plus mourir de rire.

Vient le temps de a finale. Alors que le petit Carlitos a finalement retrouvé sa maman, il court désespérément vers elle et lui saute dans les bras. Et moi, afin de leur démontrer toute l'intensité du moment, je saute à corps perdu sur ma bande de globetrotter ébaubis qui se pouffe de rire.

Encore Harry! Encore! Encore!, s'écrie-t-ils.

Mais il est tard et il est temps d'aller se coucher les enfants. Bon dodo les petits.

Vous me manquerez tous beaucoup.

14 août 2009

84. Le guts de Clara

Bredouille de mon expérience désertique, j'arrive exténué à la ville de Sucre, au centre de la Bolivie. Dans la première auberge rencontrée je m'étends sur mon lit, les deux pieds sur mon casque. J'ai à peine le temps de faire une petit roupillon qu'une jeune femme entre dans le dortoir. J'ouvre un oeil...hum...puis l'autre, en souriant.

Je la salue et me présente poliment. Elle se nomme Clara. Clara vient d'Espagne, de la région catalane plus précisément. Clara adore les suçons Lolly-Pop et déteste le chewing-gum à la menthe. Clara vient tout juste de quitter ses deux soeurs avec qui elle voyageait depuis quelques semaines et me raconte qu'elle se dirige maintenant vers l'Argentine. Entre deux conversations anodines, elle et moi faisons un pacte: je l'emmène jusqu'à la ville de Salta en Argentine et elle, bien... euh... elle m'accompagne tout simplement. Tout un deal, hein?

Au souper, je lui raconte ma débâcle du désert de sel. Voyant la déception dans mon visage, elle me propose d'y retourner, mais par la route normale cette fois-ci. Cool! Une femme avec du guts!!! Let's go (“sumi” en catalan)! En moins de deux, on achète un casque et on fait une petite révision mécanique de Calou. Et vlan! C'est parti pour Uyuni, à six heures de route de Sucre.

On nous avait averti que la route était rocailleuse, montagneuse et sinueuse. Mais sachez que cette route est l'épreuve la plus difficile que j'ai pu traverser de tout mon voyage en Amérique latine. Neuf heures durant, j'ai dû consacrer 10000000% de mes énergies à garder a moto à la verticale, car j'ai promis à Clara de ne pas la tuer. À chaque 10 mètres, la route s'amuse à changer de type de surface: cailloux, rocaille, gravier, trous, sable, rivières, chien écrapouti, bosses, etc... tout y passe. Sur la moto, je suis crispé de peur et gonflé d'adrénaline. Je sens que Clara regrette notre pacte de voyage, mais elle sert les dents et attends patiemment le bout de la route.


Finalement, un village apparaît au loin: non, ce n'est pas un mirage, mais Uyuni, enfin! Nous roulons doucement dans le rues de cette minuscule ville perdue en quête d'une auberge assez gentille pour nous accueillir tous les trois pour la nuit.

Soudain, au tournant d'un coin de rue, l'air que j'inhale me brûle les poumons, la gorge et les yeux. Je respire difficilement et ne vois presque plus devant moi. Incapable de conduire, je m'immobilise brusquement. What the hell?!? Il se trouve que nous venons tout juste de manquer une gigantesque manifestation. Ce matin, le policier en service a arrêté trois voleurs et tout le village a pris d'assaut le commissariat afin de se faire eux-même justice. Désespéré, le policier tente de disperser la foule déchaînée avec du gaz lacrymogène, sans penser aux pauvres touristes (comme nous) qui passeraient par là. Heureusement, l'armée est arrivée juste à temps afin d'éviter la pendaison des trois suspects.

Nous établissons campement pour la nuit, loin de la folie humaine, de la cohue et des coups de feu.

11 août 2009

83. Enfer de sable

De Challapata, je dis au revoir à Jacinthe et lui souhaite bonne chance dans son périple à bicyclette. De là, je ne suis qu'à 121 kilomètres de mon objectif du jour: le désert de sel de Uyuni. Ce n'est pas la route empruntée par les touristes, mais celle-ci est plus courte de moitié. Les villageois me disent tous que le chemin est mauvais, mais praticable. Je mords donc à grandes dents dans la route, car j'ai très hâte de voir ce désert plutôt original.

Zoum, zoum, zoum, je parcours la route en me gelant les membres et dégustant des paysages magnifiques. Après une quarantaine de kilomètres, la route est toujours asphaltée et je commence à avoir un doute sur la direction emprûntée. Soudain, je m'arrête afin d'aider un paysan et sa femme avec leur crevaison. La roue changée, ils m'informent que je me suis complètement planté et que je dois rebrousser chemin. Shnoutte!

De retour à Challapata, on me dirige vers une route de terre derrière le village. Je roule toujours entousiasme. Mais rapidement, la qualité de la route change pour le pire: de la terre, aux cailloux, des cailloux au gravier, puis du gravier au sable. La moto vasille de tout bord, tout côté. Mon corps se crispe et 1000% de ma concentration est strictement dédié à garder la moto debout. À plusieurs reprises, la roue avant dérape sous les plaques de sables. À uen vitesse maximale de 10 km/h, je commence à me demander si j'ai eu une bonne idée de passer par ici.

Soudain, alors que je tente d'éviter un troupeau de lamas sauvages en pleine course, ma roue avant s'enfonce dans un profond piège de sable et... c'est la chutte. Je n'y peux rien. Calou s'emballe et se couche brutalement sur le côté, me projetant vers l'avant. Je perds le pédales et aterris, heureusement, sur une dune de sable. Ouf!!! Il n'y a pas de casse de mon côté, mais Calou a quelques égratignures.


Je tente de peine et misères à la relever, mais elle s'enfonse de plus en plus dans le sable brûlant. Je creuse, creuse et creuse encore. Au bout d'un heure, je la tire de son pétrin. Je regarde droit devant et ne vois que du sable à perte de vue. Assez de sable pour me convaincre de rebrousser chemin.

Tant pis pour le désert de sel. Ce sera pour un autre voyage...


10 août 2009

82. Jacinthe à pédales

Il est temps de bouger. Je quitte le confort de La Paz et me dirige vers le Sud. Là, on me dit qu'il existe un désert de sel, le Salar de Uyuni: la plus grande étendue de sel volcanique au monde. Un désert de sel... ça vaut le détour. J'embraye la première vitesse et Calou et moi entamons un trajet de 7 heures. Derrière moi, les glaciers entourant La Paz dispraissent peu à peu et font place à d'énormes montagnes dénudées de végétation.


Quelques centaines de kilomètres plus loin, j'atteins le village de Challapata. La fatigue m'atteint et je décide d'y ériger campement. Je sillonne les rues du village en quête d'une auberge. Personne, il n'y a strictement personne et tout est fermé. J'ai l'impression d'être dans un village fantôme, un peut comme à Fermont. Plus le temps passe, plus j'ai l'impression que je vais dormir ce soir entre deux lamas.

Soudain, j'aperçois une silouhette au loin: un être humain!!! Je m'approche lentement afin de ne pas l'effrayer. Gentiement, je lui demande en espgnol où puis-je trouver une auberge. De sa courte réponse, je décèle un accent français. Quelle chance... le seul être humain du village est une parisienne.

Elle se nomme Jacinthe. Tout comme moi, elle voyage en bicycle à travers l'Amérique du Sud depuis quelques mois. Mais le sien n'a pas de moteur. Elle est comme une tortue qui traîne sa maison sa nourriture et tout ce dont elle besoin avec elle. Je suis d'ailleurs un peu jaloux de son indépendance totale.

Elle m'emmène jusqu'à son auberge où le propriétaire insiste pour nous mettre dans la même chambre, j'imagine pour éviter le nettoyage fastidieux d'une deuxième chambre. Non mais ça va pas la tête!? Je la connais que depuis 5 minutes et on doit partager le même lit? Je dépose donc mes bagages dans MA chambre et me lave de toute ma fatigue à l'aide d'une douche rafraîchissante.

Au passage, j'invite Jacinthe à soûper. Je suis tellement content de ne pas passer la soirée seul à regarder le plafond de ma chambre dans ce village dépourvu de vie. Ici, à Challapata, oubliez les McDonald's, St-Hubert ou les restos fancy. Il n'y a qu'un restaurant d'ouvert et il ne sert qu'un seul plat, plus ou moins appétissant. Mais bon, on n'a pas le luxe de faire nos difficiles. Ça ira.

Elle allant vers le Nord et moi vers le Sud par les mêmes routes, on échange conseils et expériences de voyage deux heures durant. À huit heure, nous tombons tous deux de fatigue (dans nos lits respectifs). La nuit fut glaciale et je n'ai pu fermer l'oeil. À chaque frisson, je regrettais de en pas avoir accepté l'offre initiale de l'aubergiste...

PS: Jacinthe, ai-je bien lu? Tu m'as traité de Caribou sur ton blog?!?! On se recroisera bien lorsque tu redescendras sur tes pédales vers le pôle Sud... Cuidate mucho. ;)


8 août 2009

81. Thinking of you...




Have I ever thanked you?

7 août 2009

80. La Paz

Vous savez ce que veut dire “La Paz” en espagnol? La paix. Et c'est exactement ce que j'ai ressenti en arrivant ici. Plus de douanier ou de fonctionnaire zélé. Plus de longues files d'attente. Plus personne pour me bloquer le chemin... la sainte paix, simplement La Paz, capitale de la Bolivie.

La Paz est comme un grand bol de céréales dans lequel on y aurait installé des montagnes russes en guise de routes. À l'entrée de la ville, très haut dans les montagnes et glaciers qui la ceinture, se dresse une magnifique statue faite de ferraille du Ché Guevara, célèbre révolutionnaire et héros de tous les pays latins. Je le salue humblement à mon passage.


Pour trouver son centre-ville, c'est un peu comme pour la ville de Cap-Rouge. On y met une bille parterre et on la suit jusqu'en bas. Je commence donc ma descente en spirale qui me mène jusqu'à son centre historique. Soudain, une pluie...non... de la grêle se met à tomber! Qui dit grêle, dit glace. Pas bon. Non, non, non. C'est paaaaaaaaaas bon du tout! Et c'est comme ça que tu m'ouvres tes portes La Paz? Quel accueil! Alors que la grêle s'intensifie, je me crispe, serre le guidon très fort et diminue ma vitesse drastiquement. Les véhicules autour de moi semble ignorer la glace et me dépassent en fusée. Quelques centaines de mètres plus bas, je les retrouve dans le fossé, tête en bas. C'est la cohue totale et j'ai très hâte de retrouver ma bille tout en bas.

Arrivé à mon auberge, je rentre Calou à l'intérieur. Je ne sais pas trop si je tremble de froid ou de peur. À la réception, ils me regardent comme si j'étais un astronaute qui venait d'atterrir avec son vaisseau spatial. Je m'enregistre (mon nom de famille leurs confirme mon statut d'extra-terrestre), paie les 30 Bolivianos dus (5$) et me dirige directement vers la douche. Ahhhhhhhhhhhhhh, une douche chaude! Je crois que j'ai dû vider tous les réservoirs d'eau de la ville. Honte sur moi, mais quel délice!

Il fait déjà presque nuit. Tout frais et pimpant, je sors explorer les alentours. Sans carte, ni boussole ou gilet de sauvetage, je plonge en plein coeur de La Paz. Que j'aille à gauche, à droite, devant ou derrière, les rues fourmillent de gens. La ville entière est un énorme marché aux puces. Les gens se poussent, se faufilent et se battent pour acheter cossins, vêtements ou nourriture. Les commerçant crient à tue-tête qu'ils sont les meilleurs deals du siècle. En effet: poulet (non-éplumé et décapité) à 25 bolivianos (4,15$), débouche-toilette à 5 bolivianos (0,85$) et assortiement brassières colorées à 10 bolivianos (1,70$) chacune. Mesdames, qu'attendez-vous? Je prends les commandes.

Malgré la nuit, La Paz brille de tous ses feux et je me réchauffe de ses lumières...


6 août 2009

79. Patience à vif

Il est 5:45 du matin. Mon cadran insiste pour que je me lève au plus vite, car une journée bien remplie m'attend. De Puno, cette petite ville en altitude au Sud du Pérou, je me dirige à toute vitesse vers la frontière bolivienne, encore une fois. Papiers en main, je suis sûr de mon coup cette fois-ci. Prix du carburant utilisé: 7$.

Vroum, vroum, vroum, je me dirige paisiblement vers une agence douanière privée qui s'occupera des procédures administratives pour moi. Je fais connaissance avec Edgar et Francisco qui travailleront mon cas. Je leur tends mes deux précieux papiers, avec un peu d'hésitation. Après tout, j'ai parcouru plus de 1400 kilomètres pour les obtenir... Ils me promettent que je pourrai sortir du pays d'ici 16h00. Honoraires demandés: 130$.


Patiemment, je les regarde pitonner avec acharnement sur leur ordi. Les deux feuilles de papier initiales se sont multipliées plus rapidement que le virus de la grippe porcine. 2x2x2x2x2 = trop de papiers pour moi qui suis anti-bureaucratie. Mais au moment même où Edgar allait appuyer sur la touche "Enregistrer", une panne électrique de 10 secondes survient. De retour dans mon dossier, il constate qu'il est corrompu. Il appelle son technicien qui refuse de travailler aujourd'hui. "Désolé, M. Harry, ça va aller à demain." Prix à payer pour convaincre le technicien: 10$.

Il est 11h00 pile quand ils réaccèdent mon dossier. Les touches de leur clavier sont en feu, car l'heure limite pour présenter une demande au Directeur des Douanes est 11h15. Sinon, c'est demain. On en a tous des sueurs et on regarde l'heure à chaque minute qui passe. 11h12: ils impriment. 11h14: je signe le dernier formulaire. 11h15: Francisco file à toute haleine de l'autre côté de la rue afin de soumettre ma demande à temps. Du haut de ma fenêtre, je l'observe anxieusement et me ronge les ongles. 11h17: il revient mine basse. Le Directeur l'a refusé: trop tard. Refusant de baisser les bras, Edgar reprend le dossier et refile de l'autre côté de la rue. Prix pour faire accepter mon dossier aujourd'hui: 15$.

Il est maintenant temps de faire peser ma moto, à 2 kilomètres d'ici. J'embarque Francisco derrière et file vers la balance. Prix de la pesée: 30$. Ils confisquent alors ma moto jusqu'à l'approbation du Directeur des Douanes. Prix du taxi au retour: 2$.

Patiemment, j'attends...j'attends... et j'attends jusqu'à 16h00. Le soleil descend dangereusement et la température commence à baisser. On se croirait sur la lune. Soudain, yé! Le directeur a signé. Je suis un homme , libre, libre, libre!!! Ou presque. Francisco gaspille toute une forêt en me faisant copie de mon dossier pour la route. On file vers la balance douanière, où ma moto m'attend. Prix du taxi: 2$. Prix pour convaincre le gardien de me laisser sortir avant la fin de sa pause café: 5$.

Toute une forêt en poche, je file finalement vers la guérite de la frontière. Le douanier en poste regarde ma pile et me répond que je dois passer par l'autre guérite à 2 kilomètres d'ici. Fine! Prix: Grati$.

À l'autre barrière, le douanier refuse mes papiers. Prix pour le convaincre: aucun, car il refuse systématiquement en exigeant les originaux. Grrrrr! Je repars voir le Directeur et lui explique la situation. Prix de l'explication: 15$.

Il ordonne à son bras droit d'accompagner Harry Potter au poste frontalier où il engueule le douanier qui me laisser passer. Prix du taxi de retour au bureau pour le bras droit: 3$.

Yahooooooooooooooooo!!!! Je suis en territoire bolivien! Je fais à peine 3 mètres qu'un policier m'arrête et me demande mon ticket d'entrée...euh...ticket? Quel ticket?!? Prix du ticket: 1$.

Il est maintenant 17h00. Je fais étamper mon passeport puis cogne à la porte du douanier. Soudainement, un vent violent se lève et soulève le sable de toute part. Aveuglé, le douanier bolivien me fait entrer dans son bureau. Il me demande les papiers de la moto. Je lui tends mon kilo de formulaires et il en rien a foutre. De kess!?! Il veut simplement l'enregistrement du véhicule. Je crois que je vais retourner au Pérou afin d'égorger quelqu'un. Bien emmitoufflé, il entre alors mes données dans son ordi, mais, au moment de sauvegarder, sa connexion Internet se coupe. Il me dit qu'il vente trop fort pour avoir Internet. Mais je rêve!?! Trop paresseux pour recommencer, il me demande de le faire à sa place. Entre deux bourrasques de vent, je sauvegarde mes infos et m'imprime moi-même mon autorisation de circuler en Bolivie. Prix: 0$ et beaucoup de patience.

Je ne suis qu'à un heure de la capitale de La Paz, mais je n'arrive pas à voir à deux mètres devant moi. Je me résigne donc à dormir dans la première auberge rencontrée. Prix: 10$, coquerelles inclues.


Ma bonne amie Élise m'a toujours dit: "Patience et persévérance valent mieux que cris de tabarnac!" Aujourd'hui, 9 heures plus tard et 230$ plus pauvre, j'en doute un peu...