21 avril 2009

48. Comment? 40 ans?!?

Aujourd'hui, c'est mon anniversaire, mon quarantième.

Aujourd'hui, j'ai eu un gâteau de fête qui a explosé en poussière sous ma fourchette, tellement il était passé date.

Aujourd'hui, je me suis réveillé au Honduras et je m'endormirai au Nicaragua.

Aujourd'hui, je souris plus que jamais, car chaque instant est pour moi un plaisir inespéré.

Bonne fête Harry!




16 avril 2009

47. La capricieuse Gordita

Si une photo vaut mille mots, une moto vaut mille maux. Voilà maintenant un mois que je voyage en motocyclette. Je vous avoue que cela constitue en soit, tout un défi. Cette moto, que j'ai baptisée «Gordita» (petite grosse), me transporte depuis plus de 3000 kilomètres.

Elle et moi avons fait un pacte. Moi, je jubile en la guidant à travers les routes les plus recluses et les plus crasses d'Amérique Centrale. Elle, doit en retour me faire les pires caprices: boulons perdus, freins qui crissent, chaîne qui déraille, transmission qui ne transmissionne plus, phare brulé, porte-bagages fêlé, clignotant qui fait la grève, fuite d'huile, roue arrière faussée, bearings avant usés, etc... enfin, vous voyez le portrait? De plus, Gordita choisit les pires moments pour me taquiner.

Par exemple, aujourd'hui, alors que je parcourais une minuscule route qui apparait à peine sur les cartes du Honduras, Gordita a décidé de me faire une crise existentielle: ET VLAN!!! Les quatre boulons de la roue arrières viennent de rendre l'âme. Sous le poids des deux sacs à dos, de ma passagère Kathleen et de mon moi-même, ces dernier on tour à tour cédé à la pression. Je suis maintenant immobilisé en plein milieu de nulle part, entre une vache, deux montagnes et trois poulets, sous un soleil plombant à soixante-douze mille degrés.

Reconnaissez qu'une telle situation est potentiellement source de panique. Non? Mais le «MacGyver» en moi refuse de capituler. Je sors mon arme secrète: mon Duck Tape. Tout comme la Crazy Glue, ce ruban gommé magique est capable de vous soulever et de vous suspendre des jours durant. Mais malgré mes efforts de mécanicien en herbe, Gordita refuse d'avancer. Elle exige ses boulons.



Soudain, un paysan se pointe le nez. Puis, un ado avec sa moto. Suivent ne poignée de jeunes enfants du village voisin. La nouvelle se propage comme une trainée de poudre. En l'espace de quelques minutes, de villageois souriants et prêts à tout pour nous aider.


L'un d'entre eux, Edwin, a parcouru 10 kilomètres et sacrifié trois boulons de sa propre bicyclette afin de soulager ma capricieuse moto. Ce bain de bonté spontanée me rempli d'espoir humain. Débordant de joie, je les serre tous très fort dans mes bras avant de rebrousser chemin vers le dernier signe de civilisation rencontré.

Manque de chance, l'unique garagiste du village vient tout juste de faire ne crise d'épilepsie. Chnoutte! Mais miraculeusement, la réparation insolite style «MacGyver» a tenu le coup pendant plus de 25 kilomètres jusqu'à Tocoa, principale ville de la région.

Sacrée Gordita! J'ai passé tellement de temps à ton chevet que j'ai l'impression que les garages sont maintenant pour toi des SPA où tu as hâte de te faire dorloter capricieusement. À quand ton prochain saut d'humeur?!?




7 avril 2009

46. Honduras, la "dangereuse"

Pardonnez mon manque d'assiduité dans l'écriture de mes chroniques, mais avoir une passagère demande beaucoup de temps: on doit lui faire la conversation, la nourrir, prévoir ses moindres besoins, la rassurer, la divertir et, bien sûr, voir à sa sécurité. Ce n'est pas tâche facile, mais ne vous inquiétez pas, je ne vous oublie surtout pas.

Voilà maintenant quelques jours que nous voyageons à travers le Honduras. Ce pays est magnifique et se distingue du Guatemala par l'abondance de ses rivières et, par et par conséquent, par sa nature un peu plus verte. Le Honduras possède plusieurs parcs nationaux, mais selon moi, le pays tout entier est un parc naturel. Chaque tournant de route me révèle un paysage qui m'ébaubis ou m'émerveille.

Aujourd'hui, je suis à Sana Barbara et j'aimerais me rendre au lac Yojoa, au sud-ouest du pays. On me dit que l'endroit est magique. Tous me recommandent de prendre l'autoroute pour m'y rendre. Mais savez-vous que je déteste les autoroutes? Il n'y a que des camions transportant bananes ou canne à sucre: deux excellentes façons de grossir...ou de mourir stupidement. Je regarde donc ma carte routière qui m'indique un minuscule chemin de campagne en guise de raccourci vers le lac. Je tourne en rond pendant plus d'une demie heure avant de pouvoir le trouver.

Tentant de déterminer le risque, je m'arrête et demande à un passant ce qu'il pense de cette route: «Ça va pas la tête?», me rétorque-t-il, «C'est bien trop dangereux!». Insatisfait de cette réponse, j'apostrophe un vielle homme probablement octogénaire qui nous sourie à grande dents: « Vous ne devriez pas passer par là mes enfants. Il y a des méchants voleurs sur le chemin. C'est très dangereux.», me répond-il. Toujours perplexe, j'interroge une dame qui revient du marché, les bras chargés: «Je ne crois pas que cette route se rend au lac Yojoa. De toutes façon, c'est bien trop dangereux par là! Prenez l'autoroute.». Malgré leurs réponses, mon petit doigt me dit que ces trois résidents locaux n'ont jamais mis le pied hors de leur village natal et que leur réponse est sans doute motivée par la peur de l'inconnu. Je jette un regard inquisiteur à Kathleen, cherchant son approbation pour aller de l'avant. L'expression de son visage vacille entre la peur et la curiosité, mais connaissant mon avidité pour l'aventure, elle me lance un «Let's go!» quasi spontanné.

C'est donc parti pour l'inconnu! Les trois personnages interrogés précédemment nous regardent filer à contre-courant en secouant la tête. La route est couverte de terre, de cailloux, de roches et de trous: parfait pour moi! Tranquillement, nous avançons sur un chemin de campagne à plat. Rapidement, celui-ci se transforme en montages russes sinueuses et nous catapulte à plusieurs centaines de mètres vers le ciel.


Je roule entre 5 et 10 km/h afin d'apprécier toute la splendeur des paysages qui s'offrent à nous. Je suis en mode «WOW!», à répétition. Encore et encore WOW! Collines vierges, montagnes aux formes inusitées, champs labourés, champs cultivés et champs débordants de mil et un légumes. On dirait un arc-en-ciel agricole composé uniquement de toutes les teintes de vert. Au tournant de chaque courbe, je suis littéralement estomaqué par toutes les beautés qui m'entourent. J'ai la tête qui tourne et peine à prendre mon souffle tellement je suis subjugué. Je dois constamment m'arrêter afin d'assimiler tout ce que cette «dangereuse» route a à offir. Wow! Wow! Et encore WOW!


Mais cette route n'a pas fini de nous surprendre. Un bataillon de nuages gris se pointent à l'horizon. Chnoutte!!! J'espère vraiment qu'ils passeront loin de notre chemin. Au fur et à mesure que nous roulons, ils s'approchent et nous menacent d'un gris de plus en plus obscure. Le soleil brulant fait rapidement place à une faible luminosité. Tout deviens gris et une fine bruine nous entoure. Le vent se lève, la bruine fait place à la brume et à la pluie, de plus en plus dense. Mon «wiper» (mon doigt) ne fourni pas à la demande. Rapidement, nous sommes détrempés à en faire rougir Bob l'Éponge.

La route vacille sous les roues de la moto. Tout mon corps se crispe soudainement et se concerte afin de ne pas déraper. La route s'empire de mètre en mètre. La moto glisse, mais je la rattrape à tout coup. Une heure plus tard, je n'ai toujours pas de signe de la route principale. Aucun village, aucune signalisation en vue. À chaque croisement de route, je dois y aller au pif et prendre une chance. Plus nous avançons, plus nos chances de retrouver la civilisation rapidement s'effritent. La pluie est froides et nos corps imbibés commencent à greloter dangereusement. Face au vent glacial, je crains l'hypothermie. Puis, plusieurs longues minutes plus tard, une silhouette se pointe au loin. Un paysan s'affère à couper son bois de cuisson. De mon espagnol le plus mielleux, je l'interroge. Ses paroles nous réchauffent le cœur, car nous sommes à moins de 2 kilomètres du prochain village, Agua Azul Sierra, où un hôtel style base de plein air nous attends avec un chaud café. Fiouuuuu!!!

Cette minuscule route de 15 kilomètres (selon la carte), s'étire en fait sur 33 kilomètres et a pris plus de 4 heures et demie à traverser. Plus tard, une employée de l'hôtel nous mentionne que nous venons de traverser un micro-climat appelé «cloud forest» où les nuages sont omniprésents et éternels.

Quelle folie. Quelle belle folie!

PS: À votre droite, vous trouverez le trajet que nous suivons depuis le Guatemala, pas à pas. Vous pouvez remercier Kathleen pour ce fastidieux travail.

1 avril 2009

45. La tragédie du poisson d'avril

Vous savez maintenant que ça fait un bout que j'essaie de quitter ma famille à Antigua pour finalement explorer les autres pays plus au Sud. N'est-ce pas pour ça que je suis parti en voyage? Aujourd'hui, est donc le jour-J. Depuis deux semaines maintenant, je prépare ma famille d'accueil à mon départ. Ils m'ont menacé de revoler ma moto, de cacher mes vêtements et même de vendre mon passeport au premier venu. Cette fois-ci, je m'attends au pire.

Mais j'ai maintenant une arme solide, une autre passagère: Kathleen. En effet, j'ai offert à ce sympathique personnage le siège arrière de ma moto jusqu'au Costa Rica, où elle rejoindra son ami Mauricio. Vous ne trouvez pas que c'est une excellente idée contre le kidnapping de ma moto?!?

Il est maintenant 13h et mon sac à dos est prêt. En descendant les marches du deuxième étage, je vois dans leur sourire qu'ils croient toujours à un poisson d'avril et ne me prennent pas au sérieux. Au même moment, on cogne à la porte et Kathleen se présente aussi avec son sac à dos en main. Tous les visages guatémaltèques se remplissent maintenant de consternation: c'est qu'il est vraiment sérieux ce Harry! Il nous quitte pour de bon! Leurs yeux se remplissent de larmes.

La petite Scarlett, qui a fait ses premiers pas avec moi, se précipite en quête de mes bras et me serre ardemment, comme si elle savait que je la quittais. Je sens mon coeur qui va exploser. Ils se rendent tous à l'évidence et un vent de tristesse souffle dans la pièce. Tour à tour, ils m'expriment leur affection en m'étreignant infiniment. Marielos tente de se contenir afin de ne pas pleurer. Kim, elle, explose en larmes et refuse de capituler. Ça y est, c'est à mon tour de succomber et de fondre en larmes.

Et Eduardo dans tout ça? Où es-tu petite terreur? Tu dors paisiblement dans ta basinette, faisant ta sieste quotidienne de l'après-midi. Toi, petit bonhomme d'à peine 2 ans qui m'a tant gardé éveillé la nuit, qui accoure au moindre signe de mon retour, qui pique systématiquement le brocoli de mon assiette et qui m'a tant fait rire de tes bêtises. Toi petit bonhomme qui sait pleurer de tout ton corps et rire de tout ton âme, je te quitte maintenant pour plusieurs mois et peut-être même pour plusieurs années. À toi que j'aime comme mon propre fils, j'offre tout mon courage, toute ma folie et tout l'amour qui m'habite afin que tu puisses affronter tête haute la tempête que ton pays subira sous peu.

Au revoir Antigua...