Il est 5:45 du matin. Mon cadran insiste pour que je me lève au plus vite, car une journée bien remplie m'attend. De Puno, cette petite ville en altitude au Sud du Pérou, je me dirige à toute vitesse vers la frontière bolivienne, encore une fois. Papiers en main, je suis sûr de mon coup cette fois-ci. Prix du carburant utilisé: 7$.
Vroum, vroum, vroum, je me dirige paisiblement vers une agence douanière privée qui s'occupera des procédures administratives pour moi. Je fais connaissance avec Edgar et Francisco qui travailleront mon cas. Je leur tends mes deux précieux papiers, avec un peu d'hésitation. Après tout, j'ai parcouru plus de 1400 kilomètres pour les obtenir... Ils me promettent que je pourrai sortir du pays d'ici 16h00. Honoraires demandés: 130$.
Patiemment, je les regarde pitonner avec acharnement sur leur ordi. Les deux feuilles de papier initiales se sont multipliées plus rapidement que le virus de la grippe porcine. 2x2x2x2x2 = trop de papiers pour moi qui suis anti-bureaucratie. Mais au moment même où Edgar allait appuyer sur la touche "Enregistrer", une panne électrique de 10 secondes survient. De retour dans mon dossier, il constate qu'il est corrompu. Il appelle son technicien qui refuse de travailler aujourd'hui. "
Désolé, M. Harry, ça va aller à demain." Prix à payer pour convaincre le technicien: 10$.
Il est 11h00 pile quand ils réaccèdent mon dossier. Les touches de leur clavier sont en feu, car l'heure limite pour présenter une demande au Directeur des Douanes est 11h15. Sinon, c'est demain. On en a tous des sueurs et on regarde l'heure à chaque minute qui passe. 11h12: ils impriment. 11h14: je signe le dernier formulaire. 11h15: Francisco file à toute haleine de l'autre côté de la rue afin de soumettre ma demande à temps. Du haut de ma fenêtre, je l'observe anxieusement et me ronge les ongles. 11h17: il revient mine basse. Le Directeur l'a refusé: trop tard. Refusant de baisser les bras, Edgar reprend le dossier et refile de l'autre côté de la rue. Prix pour faire accepter mon dossier aujourd'hui: 15$.
Il est maintenant temps de faire peser ma moto, à 2 kilomètres d'ici. J'embarque Francisco derrière et file vers la balance. Prix de la pesée: 30$. Ils confisquent alors ma moto jusqu'à l'approbation du Directeur des Douanes. Prix du taxi au retour: 2$.
Patiemment, j'attends...j'attends... et j'attends jusqu'à 16h00. Le soleil descend dangereusement et la température commence à baisser. On se croirait sur la lune. Soudain, yé! Le directeur a signé. Je suis un homme , libre, libre, libre!!! Ou presque. Francisco gaspille toute une forêt en me faisant copie de mon dossier pour la route. On file vers la balance douanière, où ma moto m'attend. Prix du taxi: 2$. Prix pour convaincre le gardien de me laisser sortir avant la fin de sa pause café: 5$.
Toute une forêt en poche, je file finalement vers la guérite de la frontière. Le douanier en poste regarde ma pile et me répond que je dois passer par l'autre guérite à 2 kilomètres d'ici. Fine! Prix: Grati$.
À l'autre barrière, le douanier refuse mes papiers. Prix pour le convaincre: aucun, car il refuse systématiquement en exigeant les originaux. Grrrrr! Je repars voir le Directeur et lui explique la situation. Prix de l'explication: 15$.
Il ordonne à son bras droit d'accompagner
Harry Potter au poste frontalier où il engueule le douanier qui me laisser passer. Prix du taxi de retour au bureau pour le bras droit: 3$.
Yahooooooooooooooooo!!!! Je suis en territoire bolivien! Je fais à peine 3 mètres qu'un policier m'arrête et me demande mon ticket d'entrée...euh...ticket? Quel ticket?!? Prix du ticket: 1$.
Il est maintenant 17h00. Je fais étamper mon passeport puis cogne à la porte du douanier. Soudainement, un vent violent se lève et soulève le sable de toute part. Aveuglé, le douanier bolivien me fait entrer dans son bureau. Il me demande les papiers de la moto. Je lui tends mon kilo de formulaires et il en rien a foutre. De kess!?! Il veut simplement l'enregistrement du véhicule. Je crois que je vais retourner au Pérou afin d'égorger quelqu'un. Bien emmitoufflé, il entre alors mes données dans son ordi, mais, au moment de sauvegarder, sa connexion Internet se coupe. Il me dit qu'il vente trop fort pour avoir Internet. Mais je rêve!?! Trop paresseux pour recommencer, il me demande de le faire à sa place. Entre deux bourrasques de vent, je sauvegarde mes infos et m'imprime moi-même mon autorisation de circuler en Bolivie. Prix: 0$ et beaucoup de patience.
Je ne suis qu'à un heure de la capitale de La Paz, mais je n'arrive pas à voir à deux mètres devant moi. Je me résigne donc à dormir dans la première auberge rencontrée. Prix: 10$, coquerelles inclues.
Ma bonne amie Élise m'a toujours dit:
"Patience et persévérance valent mieux que cris de tabarnac!" Aujourd'hui, 9 heures plus tard et 230$ plus pauvre, j'en doute un peu...