1 mars 2009

38. La alfombra

J'ai quitté Antigua il y a une semaine en faisant la promesse à ma famille adoptive de revenir aujourd'hui. Ils nous réservent une surprise à Sanna et moi.

Je viens de me taper cinq heures de route en moto-cross, mais ça, ils s'en balancent. Dès mon arrivée, ils me kidnapent pour m'emmener à Santa Catarina, où un évènement religieux prend présentement place: la vélation. Les gens font la file pendant 2 heures pour contempler sur le sol une oeuvre spécialement conçue pour l'occasion et appelée «alfombra». On pourrait définir l'alfombra comme étant un dessin au sol à base de poussière de bois ou brin de scie. La longue file d'attente en vaut la peine. Wow! Quelles couleurs! La famille m'annonce que nous devons faire de même devant la maison.

Et de retour au bercail, une montagne de brin de scie nous attend. On m'enseigne la technique de colorisation. Notre alfombra est composée de 8 différentes couleurs vives. J'ai maintenant les mains imbibées de concentré de colorant qui ne veux plus partir.


Le lendemain, dès l'aube, nous commençons l'oeuvre d'art, en plein milieu de la rue. Elle mesure 4 mètres par 2 mètres.



D'abord, on étend une bonne couche de fond incolore...



...sur laquelle on saupoudre une fine couche de jaune pétant.



De temps à autres, on doit arroser le tout afin de le protéger du vent qui souffle.


On appose ensuite la mosaïque centrale montrant la scène du dernier repas de Jésus.



On utilise ensuite un modèle afin de dessiner les motifs floraux, un peu comme une peinture à numéros, mais en remplissant les trous de brin de scie coloré.


Certaines étapes relèvent de l'acrobatie...


On complète le tout par une bordure, bien fleurie elle aussi.



Et voilà! Cinq heures plus tard, le chef-d'oeuvre est maintenant complété, juste à temps pour le passage de la Procession, symbole biblique du Dimanche des Rameaux.



Au loin, on aperçoit déjà les romains qui ouvrent le passage. Au centre du cortège, une soixantaine de croyants vêtus de toges mauves transportent une gigantesque plateforme allégorique de la Vierge Marie. À son passage, les gens s'émeuvent et certains pleurent chaudement. Ici, la foi est puissante.


À l'avant, un prêtre dirige la marche...TOUT EN PIÉTINANT NOTRE ALFOMBRA!

AAAAAAAAAAaaaaahhhhhhhhh!!!!!!

NOOOOOOOOOOOONNNNNNN!!!!!!!

Booooooooooooooooouhouhouhou!!!!!

En moins de 1 minute, cinq heures de travail acharné s'envolent en poussière ou en donation à Dieu, dépendamment de vos croyances.

Et voici ce qu'il en reste. On dirait maintenant un Monet...



Derrière le long cortège, un camion de la ville s'apprête à balayer les restes de notre précieuse alfombra, mais pas question que je les laisse faire: Over my dead body!



... enfin, presque...


Quelle coutume. Quel rite. Je me sens loin, très loin de l'Halloween, de la St-Valentin et des cocos de Pâques...

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Wow tu parles d'une belle oeuvre. Je comprends qu'après 5 heures de travail il faut vraiment être croyant pour regarder son dessin être piétiné. C'est super intéressant ton récit et avec de belles images.Flore

Enregistrer un commentaire

(Choisissez "Anonyme" et inscrivez votre nom au bas de votre message) Merci de me laisser vos commentaires. Ils sont bien appréciés! :)